La Doñana : entre dunes andalouses et lagunes méditerranéennes
Proche de Séville, au Sud de l’Espagne, s’étend le trésor caché de l’Andalousie. Adossé à l’océan Atlantique et embrassant l’estuaire du Guadalquivir, le parc national de Doñana déploie ses marais, lagunes, garrigues et dunes sur des milliers d’hectares.



Dans ce vaste espace naturel s’épanouissent plus de 4000 espèces animales différentes. Parmi elles, le lynx ibérique, ce félin aux oreilles pointues et au pelage tacheté, que l’on compte parmi les espèces les plus menacées d’Europe. Mais le véritable spectacle se joue dans les airs. Doñana est le plus gros hub aérien européen – version plumes et ailes. Chaque année, jusqu’à 6 millions d’oiseaux y font escale avant de traverser le détroit de Gibraltar, porte d’entrée vers les chaleurs africaines.


Bien plus qu’une réserve de biodiversité
La Doñana n’est pas qu’un sanctuaire pour oiseaux voyageurs et mammifères rares. Elle rend des services inestimables aux 200 000 humains qui vivent en périphérie. Sans parler des milliers de touristes qui profitent des côtes andalouses chaque été !
La Doñana fournit l’eau douce qui fait tourner toute l’économie régionale. Sans elle, pas de ports actifs, pas d’agriculture florissante, pas de tourisme rafraîchissant – et encore moins de pêche élevage dans les environs.
Plus impressionnant encore, ce milieu humide joue les superhéros climatiques à double titre. D’un côté, il absorbe le carbone comme une éponge, luttant contre le réchauffement climatique. De l’autre, il forme un bouclier naturel contre les colères de l’océan, amortissant crues et tempêtes avant qu’elles n’atteignent les terres habitées. Découvrez dans cet autre article les superpouvoirs des zones humides !
Quand un ornithologue Suisse rencontre un biologiste espagnol

Cette compréhension profonde du rôle vital des terres d’eau pour notre qualité de vie, nous la devons en grande partie à un homme : Luc Hoffmann. En 1948, bien avant que l’écologie ne devienne tendance, il pose ses valises en Camargue, dans le sud de la France, avec une idée bien précise en tête : protéger le delta du Rhône et y ouvrir un centre de recherche dédié aux milieux humides.
Ce nom vous semble familier ? C’est normal ! On vous en avait déjà parlé dans cet article : Delta du Rhône : première zone humide protégée en France. C’est à cet ornithologue suisse que l’on doit les premières avancées en matière de conservation des zones humides.
Pendant que la Camargue française trouve son protecteur, la Doñana espagnole reste un angle mort sur les cartes de conservation. Jusqu’à la fin des années 1950, ce paradis sauvage sommeille, oublié du monde moderne… avant que la fièvre du développement ne s’en empare.
L’œil avisé de Luc Hoffmann se tourne alors vers cette zone menacée. Il unit ses forces à celles de José Antonio Valverde, biologiste espagnol passionné, déterminé comme lui à sauver ce joyau naturel avant qu’il ne soit trop tard.
Le premier crowdfunding écologique de tous les temps
Luc Hoffmann n’était pas seulement un brillant scientifique. C’était aussi un diplomate talentueux. Engagé dans la création du WWF (World Wild Fund), il propose un pari audacieux : faire de la sauvegarde de la Doñana la première grande mission de l’ONG.

C’est ainsi qu’en 1961, le WWF, cofondé par Luc Hoffmann notamment, lance une initiative révolutionnaire pour l’époque : un appel aux dons pour protéger la Doñana. Imaginez la première campagne de crowdfunding environnemental de l’histoire, bien avant l’ère d’internet et des réseaux sociaux !
Cette campagne de financement participatif, couplée à d’intenses négociations avec le régime de Franco, aboutit à un exploit : l’achat de près de 6800 hectares de terres sauvages. Suffisant pour créer, en 1969, un parc protégé regroupant les marais et forêts les plus précieuses.
La reconnaissance ultime viendra en 1994, quand le parc reçoit le titre de patrimoine mondial de l’UNESCO. Une protection de taille pour ces terres d’eau qui avaient bien failli disparaître sous le béton quelques décennies plus tôt.
Des fraises, du tourisme et du béton : la triple menace
Malgré son statut protégé, la Doñana reste aujourd’hui sur la corde raide. Les projets d’infrastructure se multiplient autour de ses frontières : extension du port de Séville, dragage de l’estuaire du Guadalquivir, stockage souterrain de gaz, rejets industriels toxiques, nouvelles routes… Tous ces projets mis en œuvre et planifiés grignotent peu à peu le territoire.

Sans parler de la culture de la fraise et de la myrtille, très vorace en eau. 90% de la production espagnole avant tout dédiée à l’exportation pousse autour de Doñana, aspirant l’eau des nappes souterraines de manière parfois illégale. Ajoutez à cela le tourisme de masse, et vous obtenez l’équation impossible : les activités humaines pompent désormais plus d’eau que ce que l’Andalousie peut naturellement produire.
Cette soif insatiable, amplifiée par la baisse des précipitations liée au changement climatique, menace d’assécher la région. Comme si nous tenions absolument à scier la branche sur laquelle nous sommes assis…
WWF Espagne : les gardiens de l’or bleu
Face à ces menaces toujours plus pressantes, le WWF Espagne mène un combat exemplaire depuis les années 1990. Sous l’impulsion de Juan Carlos del Olmo, son secrétaire général et fervent défenseur de la zone humide, l’ONG déploie une stratégie à plusieurs niveaux.
Sur le front juridique, l’organisation multiplie les actions légales devant la Commission européenne et les tribunaux nationaux, pour faire respecter ou évoluer les lois environnementales.
À l’échelle régionale, le WWF :
- limite l’agriculture intensive
- encadre le développement des infrastructures
- optimise la gestion de l’eau autour du Guadalquivir.
Plus concrètement encore, les équipes mènent des actions terrain pour protéger le lynx ibérique. Grâce à leurs efforts, cette espèce n’est plus en danger, mais elle reste “vulnérable”.
À votre tour de sauver les terres d’eau
L’avenir de la Doñana repose sur notre capacité collective à trouver un équilibre, entre préservation des ressources naturelles et développement des activités humaines.
Il est crucial de poursuivre les actions de préservation et de sensibilisation. Chaque hectare sauvé, chaque espèce protégée, chaque service écosystémique représente une victoire pour la biodiversité et pour l’habitabilité de la planète.
L’histoire nous l’a prouvé : l’appel aux dons citoyens a déjà sauvé la Doñana. C’est pourquoi Flamingo, inspiré par ce modèle pionnier, souhaite le répliquer pour soutenir ces héros qui protègent les zones humides du pourtour méditerranéen.
Nous sommes en train de lancer la première plateforme de crowdfunding dédiée à la conservation des milieux humides. Prêt à rejoindre l’aventure ? Inscrivez-vous à notre newsletter pour découvrir les projets à venir. Ensemble, écrivons la suite de l’histoire de Doñana et de tous ces précieux écosystèmes qui font battre le cœur de notre planète bleue.